Cette édition de notre rubrique nous a menés à Farciennes, sur la Zone d’activité économique du Roton, situé à un jet de pierre du Ring de Charleroi. Une fois arrivé sur le zoning, il est impossible de manquer les installations des Etablissements Trentin, tant le dépôt en impose par sa taille. Au cours de notre rendez-vous, Benoit Trentin nous a présenté son entreprise, partagé ses projets ainsi que sa vision sur la profession de distributeur en boissons...
Que pouvez-vous nous dire sur l’histoire et l’évolution de l’affaire familiale?
Benoit : «Mes parents sont venus d’Italie dans les années 50, mon père étant originaire de Venise et ma mère de Rome. En 1952, mon père a lancé sa propre affaire, un commerce en vins et alimentation, donc à l’époque pas un négoce de boissons à proprement parler. Cela fait d’ailleurs une trentaine d’années que nous sommes importateurs de vins français et italiens. En 1993, après le décès de mon père, j’ai repris avec mon épouse Marie-Françoise les commandes de l’entreprise, qui comprenait à l’époque un dépôt de plus ou moins 150m². J’ai remis la partie alimentation pour me consacrer au négoce de boissons. Je représente donc la première génération de « brasseur » dans l’histoire de l’entreprise familiale. Cela implique que j’ai démarré avec zéro client, démarchant en premier lieu les clubs de football et de tennis de la région, ainsi que les organisateurs de festivités. Je suis d’ailleurs depuis plus ou moins dix ans propriétaire d’un club de tennis, le Bjorn’s Club, dont mon fils ainé Nicolas (24 ans) est le gérant. Le plus jeune de mes fils, Lucas (21 ans) travaille dans le négoce en boissons et se destine à reprendre un jour l’entreprise.»
« Bien des choses ont évolué depuis que j’ai repris l’affaire. Le dépôt de 150m² de mon père a dû faire place à un dépôt de 2500m². Lorsque celui-ci s’est avéré trop petit, nous avons déménagé sur le complexe du Roton, l’emplacement actuel du négoce. Nous avons d’ailleurs été la première entreprise à s’installer sur le nouveau complexe, il y a 15 ans. Aujourd’hui, nous bénéficions d’un site d’une surface totale de 6.000 m². Nous employons 21 personnes : 5 employés et 16 chauffeurs et manutentionnaires. »
Vous avez probablement dû à plusieurs reprises opérer des choix stratégiques concernant l’avenir de la société ?
« Bien sûr, et le dernier très récemment. En 2017, nous avons réorganisé en profondeur toute la partie drinks de l’entreprise, afin de nous adapter à la demande. Suite à l’augmentation des accises, nous avons comme tout le secteur subi une baisse de la vente d’alcools. Dans un pays de la taille de la Belgique, la frontière n’est jamais loin et les clients ont tôt fait de s’approvisionner à l’étranger, dans notre cas, en France ou au Luxembourg. Face à cette situation, nous avons dû adapter notre offre, en mettant plus l’accent sur la qualité de la gamme, la diversité des produits. Nous nous sommes spécialisés dans l’importation d’alcools du nord de l’Italie et avons également développé une gamme de produits de petite alimentation, comme les chips ou autres snacks. L’explosion des microbrasseries est également à la base de cette réorganisation. »
« Nous avons également fait le choix conscient de ne pas nous focaliser sur le segment des festivités. A mon sens, ceci représente beaucoup de boulot pour peu de rendement. C’est pourquoi la majeure partie de nos activités se concentre sur l’horeca et le drinks.»
« Un autre choix stratégique posé depuis plus de dix ans était celui d’intégrer le groupement d’achats Distribel. »
Qu’aimez-vous particulièrement dans le métier de négociant en boissons ?
« Premièrement la variété de cette activité. Il faut vraiment être polyvalent pour faire ce métier. En cas de besoin, je suis capable de remplacer n’importe qui dans l’entreprise. Il y a également l’aspect du contact avec la clientèle, qui est déterminant dans notre secteur. »
« J’ai également la possibilité de combiner ma passion pour le tennis avec les activités du négoce. Ainsi, dans le cadre des installations du club, nous organisons chaque année des cours de débit, auxquels nous invitons une trentaine de clients. Ce n’est d’ailleurs pas la seule occasion d’inviter nos clients. Nous organisons dans le magasin régulièrement des dégustations de vins, apéritifs ou alcools. »
Il y a sans doute également des défis auxquels vous êtes confrontés…
« Comme je l’ai déjà signalé, il y a la concurrence des pays limitrophes, principalement en raison de l’augmentation des accises sur l’alcool. Cette décision a eu un effet néfaste sur la vente d’alcool en Belgique. Le niveau d’accises devrait être comparable entre les différents pays limitrophes.»
« Un défi qui se présente à nous également, c’est la relève. Mon projet à terme est d’aller retrouver le soleil de l’Italie. Je suis actionnaire d’un groupe de Bed & Breakfasts dans le sud du pays, et j’y passe d’ailleurs très régulièrement un weekend pour gérer les affaires sur place, le but étant dans l’avenir d’y passer plus de temps. C’est donc mon fils Lucas qui reprendra les rênes de l’entreprise. Il n’a que 21 ans et la route est encore longue, mais il est très actif au sein de l’entreprise et se forme intensivement, notamment via les formations web d’AB InBev et une formation en œnologie. Même si après toute ces années, l’envie de lever le pied est bien présente, nous sommes toujours là pour l’accompagner dans son apprentissage, jusqu’à ce qu’il soit prêt.»
Comment voyez-vous l’avenir de la profession en général ?
« On entend beaucoup dire que l’on se dirige vers un secteur avec beaucoup moins de négociants mais de plus grande taille. Pour ma part, je constate d’expérience qu’il y aura toujours de la place pour des négoces en boissons de taille moyenne. »
Que signifie FEBED pour vous et quelles sont vos attentes pour le futur ?
« Je dois avouer que je ne lis pas assidument les informations qui me sont envoyées, même si je les consulte. »
« En ce qui concerne la défense des intérêts de la profession, je souhaiterais une intervention sur le dossier des accises sur l’alcool. Même si je pense qu’il est peut-être déjà trop tard, le client ayant déjà pris ses habitudes. »
« Une idée à mettre en place serait d’organiser des formations au niveau des programmes informatiques de gestion. Il faudrait peut-être solliciter les grands fournisseurs en la matière, afin de mettre en place ce genre de formations pour les négociants. Je suis persuadé que même les négociants les plus habitués avec les systèmes ne l’utilisent qu’à maximum 80% de leurs capacités. »
Un dernier conseil à donner à vos collègues distributeurs ?
« Oui. Je conseillerais à tous mes collègues de viser à vendre un maximum auprès de leurs clients existants : vins, apéritifs, petite alimentation comme chips ou cacahouètes. Plus étendue sera la gamme vendue, plus le fonctionnement interne pourra être organisé efficacement.»